Poireaux, en vert et contre tout

Jura Sud Parc

Le vendredi, on ne fait pas dans la dentelle, on débarque avec 3 CBR125. La Carotte, le Petit Pois et le Radis Noir (oui, je viens de donner un nom à la moto de Romain, comme ça). Le programme est simple : rouler, rouler et encore rouler. Mais avant ça on met des pneus dignes de ce nom sur la moto de Romain, car de grip, les Eagle Grip n’ont que le nom. On lui monte donc des BT39SS (que nous avions utilisé à nos débuts) et c’est parti. Le circuit de Jura Sud est vraiment chouette, avec des virages qui peuvent se prendre poignée dans l’angle et une partie plus technique. Il y a même du dénivelé. Avec pas grand monde sur la piste, on se régale. On roule un bonne heure avant même la pause déjeuner. Et on recommence l’après-midi. Romain se paye le luxe de rouler plus vite que nous avec un Radis Noir où juste rétros et clignos ont été retirés. On va dire que c’est le rapport poids-puissance.

 

Et là, c’est le drame

Deuxième roulage de l’après-midi, je suis bien, mes chronos baissent régulièrement, j’arrive à claquer quelques temps en 53,9. Je suis sur le point de prendre un tour à Seb. Je tente une attaque, mais voyant que ça ne passe pas, je prends les freins. Sauf que Seb aussi prend les freins fort pour éviter de percuter un jeune pistard moins rapide. Et là je vois mon pneu avant s’approcher de son pneu arrière. Je serre les freins le plus fort possible tout en me disant que ça ne passera pas mais que je ne veux pas foutre mon meilleur ami au tas. Cela n’a pas du durer plus de quelques dixièmes mais dans ma tête c’était très long. Puis je me relève avec mal à l’épaule. Car oui, je suis tombé. Heureusement Seb est sur ses roues. Ne me demandez pas comment j’ai chuté, je ne sais pas trop. Tout ce que je sais c’est que la moto est au sol au beau milieu de la piste et que j’ai mal à l’épaule. Du genre qui rappelle une certaine clavicule. J’essaye de relever la moto mais je n’y arrive pas. Heureusement, une pilote qui a vu la chute du bord de la piste, Aurélie, traverse la piste en courant, avec sa combi pour m’aider. Un grand merci à elle d’avoir réagi rapidement et d’avoir ramené la moto. Je rentre dans les stands en quad, et arrivé sur place je suis pris en mains par la famille de Juju (jeune et talentueuse pilote). Je ne suis pas bien et accepte qu’on appelle les pompiers. Il parait que je suis blanc mais en voyant Seb je me dis que je ne peux pas être plus blanc que lui. On me retire ma combi et je me change pour ne pas avoir à passer plusieurs jours à l’hosto dans des sous-vêtements dégueulasses. Et pendant ce temps Romain arrive à me faire rire en jouant les photographes. Les pompiers arrivent et décident de me foutre dans une coquille vu que j’ai mal au cou. Hop, direction Saint-Claude, qui, selon moi, devrait être célèbre non pas pour ses pipes mais pour les trous dans la route, qui augmentent à l’approche de l’hosto. J’en profite aussi pour remercier les pompiers qui ne verront sûrement pas ce message : vous avez été au top les gars.

Aux urgences, je passe un scanner, et tout va bien, rien de cassé ! (Je vous fais la version courte). Toute l’équipe est soulagée. Bon, je ne peux pas enfiler un t-shirt mais c’est un détail. Seb me ramène au gîte où Romain nous a préparé le dîner. Devant une bière, j’envisage de rouler demain. Mais pour ça il faudra attendre l’avis de Michel qui a la double casquette de Team Manager et kiné.

Ne faites plus un seul geste, leur vision est basée sur le mouvement

Max, Axel et Alice

Le samedi matin, c’est l’adage que je mets en pratique vu comment je suis bloqué. Michel analyse le scanner et me déclare apte au combat. Cool, Romain et Seb n’auront pas à faire la course à deux. Direction le circuit où Max, Alice et Axel nous rejoignent en début d’après-midi. Romain n’a pas roulé beaucoup avec la Carotte le vendredi, et c’est notre grosse erreur du week-end. Le mode d’emploi n’est pas du tout le même que sur son Radis Noir, et il a du mal à s’approprier la moto. Surtout qu’elle a été pensée pour un bûcheron de 90kg et 1m84. Il doit donc se battre avec la moto et n’arrive pas à rouler serein. Ce qui ne l’empêche pas de claquer la pole de l’équipe, et de nous placer 15e lors de la première qualif avec un chrono en 52.093 (oui, le tour fait moins d’une minute). Seb améliore aussi bien ses chronos et nous claque des 54. Je suis à quelques secondes derrière, devant composer avec une épaule douloureuse sur les freinages, les rétrogradages et les tampons des pilotes en supermot’ qui essayent de me faire l’extérieur en déclenchant leur virage avant moi (sauf qu’on ne tamponne pas un gars comme moi en espérant le faire bouger… le supermot’ a du faire un tout droit pendant que je gueulais de douleur dans mon casque).

Sur la deuxième qualif, Romain n’arrive pas à améliorer et il continue à se plaindre de la moto. Avec raison car en faisant la pression du pneu avant, nous sommes à 1,4 en sortie de piste. Puis après quelques minutes, le pneu est à plat. On change l’obus et on avisera le lendemain.

On décide d’intervertir les systèmes de freinage entre les deux motos pour gagner en puissance de freinage. Sauf qu’on a eu galère sur galère : durite qui passe par un endroit pas pratique, vis foirée. Bref, de la mécanique qui se finit avec une perceuse et un marteau. Au final, on a une moto prête… On peut alors se régaler des ti punch faits par Axel qui accompagnent très bien le plat qu’il nous a mijoté avec Alice.

On a pu ensuite se détendre sous les mains de Michel, dont les talents de massage ne sont plus à prouver.

Ils se déplacent en troupeaux … Ils se déplacent en troupeaux

Pour des raisons diverses et variées, je vais prendre le départ de la course. Bon, ok, c’est surtout parce que j’ai un gabarit qui fait peur, et que je n’ai pas tendance à me laisser marcher sur les pieds une fois sur piste. J’avoue que je flippe un peu. Mais le team est là et on a Juju qui nous supporte jusqu’au bout. Elle a même réussi à négocier avec ses parents de rester pour voir le départ.

Tour de chauffe, je suis surpris par des pilotes qui pilent aux trois quarts du circuit. J’encaisse le freinage dans l’épaule. Bon, la douleur est là, on va faire avec. Je suis à la 18e place, à l’intérieur. Je cale le moteur à 8000 tours/minute. Mon cœur doit être au même régime. Le drapeau tricolore se baisse et je m’élance sur la moto. Je fais un bon départ et j’arrive à gratter quelques places. Je joue toutefois la prudence, à la fois pour mon épaule mais aussi parce qu’une chute serait la dernière chose dont nous avons besoin. J’essaye de hausser le rythme mais ne roule qu’en 55. Une partie des gens qui étaient derrière moi sont plus rapides. Je ferme les portes mais certains passent. Je donne tout ce que je peux jusqu’à ce qu’un concurrent chute lourdement (promis j’y suis pour rien). La safety car est sortie, je suis derrière elle. Michel me fait durer, vu que ce n’est plus fatigant. On tente un relais dans le même tour de la safety car, pour ne pas perdre de tour. Sauf que Romain qui prend le relais se fait bloquer à l’entrée. Il est arrivé trop tard. On doit donc attendre un tour.

La safety sort et Romain se lance dans la course. Il a toujours du mal avec la moto, mais arrive à rouler régulièrement en 53. Au moment du passage de relais à Seb, Romain décide de faire une Marie et de ne pas voir le panneau. A force de l’agiter dans tous les sens, le jaune lumineux attire son œil et Romain passe le guidon à Seb. Bien qu’il soit le dernier à partir, Seb se met tout de suite dans le rythme et nos relais sont de plus en plus fluides. Il va par contre devoir faire gaffe car Michel ne peut pas m’utiliser comme bête de somme et c’est Seb qui va devoir assumer ce rôle et hériter de relais plus longs. Au bout d’une heure nous sommes P20.

Seb enroule de plus en plus fort et garde un bon rythme sur presque 30 minutes. Il me passe ensuite le guidon, sur la fin d’un safety car… qui finit n’importe comment. Nous pensions utiliser cela à notre avantage mais la safety sort sans faire un dernier tour sans gyrophare. Nous sommes – désagréablement – surpris.

Ce fut le relais de l’enfer. En forçant sur mon bras droit pour compenser, je me chope des fourmis dans la main. Je n’ai plus aucune sensibilité dans les doigts et vois le panneau Box comme une libération. Même si j’ai réussi à rester régulier, j’ai perdu une à deux secondes par tour.

Le Poirsouillosaurus n’est pas une espèce éteinte

Après un ravitaillement d’essence réalisé dans les règles de l’art (et immortalisé par l’organisateur de la course pour montrer ce qu’il faut faire), Romain reprend son relais. Comme au premier, il a du mal avec la moto et ne prend pas de risque. Petite blague, l’endroit où on doit panneauter a changé et Romain n’est pas au courant. Il aura donc fallu huit tours pour qu’il voie l’indication qu’il doit sortir. Heureusement nous avions un peu de marge pour ne pas dépasser les 30mn.

Je pars pour mon dernier relais, et j’arrive à choper la roue du #33 qui vient de me doubler. Je passe 15 minutes en chasse derrière lui. Je suis enfin bien sur la moto. J’arrive même à signer plusieurs chronos en petit 54. Michel me sort au bout de 20 minutes, afin de ne pas prendre de risque avec ma condition. Romain part pour son dernier relais, nous sommes toujours en place 20. Au bout de 25 minutes le miracle arrive. Romain voit le panneau du premier coup ! Hurlement de joie dans le box. C’est une victoire ! Seb va finir la course, nous sommes 19e avec 2 tours de retard sur le 18e et 2 d’avance sur le 20e. Seb a pour mission de finir la course sans prendre de risque. Il ralentit donc le rythme. Peut être un poil trop à cause de la fatigue, car nous avons découvert ensuite qu’à la fin de la course notre poursuivant n’était plus qu’à 28 secondes derrière nous.

Seb est tellement content qu’il va même faire deux tours d’honneur.

Trois minutes après la fin de la course, un déluge s’abat sur nous. Du genre biblique. Mais il faut ranger, alors nous finissons trempés.

On s’est dépensé sans compter

Ce fut encore une fois un week-end riche, ma chute étant venue foutre un poil le bordel. Mais ce fut un week-end intense, où chacun a pu montrer qu’il regorgeait de capacités. Romain a réussi à avoir des chronos pas dégueulasses du tout avec une machine ne lui convenant pas. Seb a prouvé qu’il était capable de rouler plus pour compenser la défaillance d’un pilote. J’ai pu moi aussi me dépasser et rouler avec une épaule en vrac.

On tient à remercier nos partenaires : l’équipement.fr, Helite (si je n’ai rien, c’est quand même un peu grâce à l’airbag), 25PowerRacing (merci d’avoir envoyé le demi guidon rapidement, ça a été utile), tiregom.

J’ai aussi envie de passer des remerciements spéciaux. Déjà à Aurélie qui est venue me sortir du bac. A Juju qui a remonté le moral de Seb après ma chute (et qui a fait une super course le dimanche), à ses parents qui m’ont pris en charge. A Vincent qui a assuré l’orga de la course en urgence et qui s’est très bien débrouillé. A Chérie et mes filles pour leurs messages quand j’allais pas bien. Et à tous les gens qui ont pris de mes nouvelles pendant le week-end, que ce soit sur le paddock ou sur les réseaux sociaux. Merci à tous.

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